Résumé et conclusion

Tous les éléments de cette enquête sont vérifiables et toutes les sources sont publiques et clairement citées.

Il n’y a presque plus aucun doute sur le fait que les deux partis arrivés premiers aux élections législatives du 6 octobre 2019, Ennahdha et Qalb Tounes sont hors-la-loi.

En effet, tous les deux ont eu recours à une même pratique strictement interdite par la loi : financer des campagnes électorales par des sources étrangères.

Ennahdha et Qalb Tounes ont tous les deux signé et financé des contrats de lobbying avec des ressources étrangères, en utilisant des prête-noms pour faire signer des contrats publiés sur le site du Département de la Justice des États-Unis sous la loi du Foreign Agents Registration Act (FARA) (a). Malgré que les deux partis nient ces accusations, les faits sont indéniables, et leur défense sera impossible à mener devant une cour de justice indépendante.

L’alliance entre Rached Ghannouchi et Nabil Karoui est devenue donc une alliance nécessaire pour que les deux partis masquent leur crime en s’assurant le contrôle du pouvoir exécutif et de l’appareil judiciaire. Ceci a bien évidemment des implications graves qui ont mené à une corruption profonde de l’institution démocratique, et à une détérioration sans précédent de la confiance des électeurs, mais aussi des institutions nationales et internationales.

Une application de la loi électorale aurait immédiatement annulé les listes de Ennahdha et de Qalb Tounes aux élections législatives, et leur aurait aussi imposé des amendes. Pour ce qui est des élections présidentielles de septembre-octobre 2019, une application de la loi aurait mené à une peine de 5 ans de prison au candidat Nabil Karoui.

Résumé (en arabe) dans cette vidéo. Et tous les détails de l’enquête avec toutes les sources ci-dessous.

Vidéo qui résume les affaires de Ennahdha et Nabil Karoui (en arabe tunisien)


Introduction

Dans un article précédent, j’avais publié une enquête sur Madame Ifhat Smith, la dame qui signe, de Londres, les contrats de lobbying de Ennahdha avec Burson Cohn & Wolfe (BCW), depuis au moins 2014 (3) (3c).

J’avais aussi précisé que la ligne de défense de Ennahdha est de dire que les dirigeants du parti ne la connaissent pas, et qu’il s’agit d’un complot extérieur contre leur mouvement politique. Nabil Karoui, fondateur du parti Qalb Tounes, a adopté exactement la même ligne de défense, vu qu’il est lui aussi impliqué dans un contrat de lobbying financé par des fonds étrangers pour des vues électorales.

Signalons que Ennahdha a signé des contrats de lobbying en vue de campagnes électorales depuis des années. Avant les élections du 26 octobre 2014 par exemple, Ennahdha a engagé la firme Burson-Marsteller à Washington. Un dépôt légal du contrat a été publié dans les fichiers du Département de la Justice des États-Unis le 18 septembre 2014. La nature du contrat ne laisse aucun doute sur le fait qu’il visait les prochaines élections. On peut en effet y lire (3a) :

“Provide the Ennahdha Party support on media and stakeholder outreach in advance of upcoming elections.

Pour les élections du 6 octobre 2019, l’investissement de Ennahdha auprès de Burson-Marsteller a commencé dès le mois de mai 2016, du moins en ce qui concerne les activités de lobbying aux États-Unis, avec encore la même mention concernant les prochaines élections (3b).

Il faut rappeler que signer des contrats de lobbying et engager des firmes pour des services de relations publiques n’est pas illégal ; c’est plutôt le financement de campagnes électorales par de sources étrangères qui est strictement interdit par l’article 80 de la Loi relative aux élections et aux référendums (1).

“Art. 80 – Il est interdit de financer la campagne électorale par de sources étrangères, y compris les gouvernements, les individus et les personnes morales. Est réputé financement étranger, tous les biens sous forme de don, cadeau, ou subvention en numéraire, en nature ou de propagande dont l’origine est étrangère conformément à la législation fiscale, et ce, quelle que soit la nationalité du financeur.

N’est pas réputé financement étranger, le financement des listes de candidats aux circonscriptions électorales à l’étranger par les Tunisiens à l’étranger.

L’Instance fixe les règles, procédures et modes de financement qui prennent en compte les spécificités du financement des listes de candidats aux circonscriptions électorales à l’étranger.”

Le contrat de lobbying de Nabil Karoui

Rappel de dates clés :

  • Date de la rencontre entre Nabil Karoui et Ari Ben-Menashe : 18 et 19 août 2019.
  • Date de la signature du contrat de lobbying : 19 août 2019.
  • Date de la 1ère arrestation de Nabil Karoui : 23 août 2019.
  • Date du 1er tour des élections présidentielles : 15 septembre 2019.
  • Date de l’enregistrement du contrat par le Département de la Justice aux États-Unis : 26 septembre 2019.
  • Date des élections législatives : 6 octobre 2019.
  • Date du 2ème tour des élections présidentielles : 13 octobre 2019.
  • Ghannouchi devient Président de l’Assemblée avec les votes de Qalb Tounes et Al Karama : 13 novembre 2019.

Le contrat de lobbying de Nabil Karoui est disponible sur le site du Département de la Justice des États-Unis, et il est signé par deux personnes (2) :

  1. Ari Ben-Menashe, pour Dickens & Madson Inc., à Montréal, Canada.
  2. Mohamed Bouderbala, en tant que représentant de Nabil Karoui.

Le montant du contrat est de 1 million de dollars US pour une durée d’un an. Les services sont détaillés sur la copie publiée du contrat et incluent :

  • Lobbying auprès des États-Unis, de la Russie, des Nations Unis, de l’Union Européenne et autres afin d’atteindre la Présidence de la République.
  • Essayer d’organiser un meeting avec Donald Trump d’autres hauts responsables américains avant le 15 septembre 2019 (date du 1er tour des élections présidentielles).
  • Essayer d’organiser un meeting avec Vladimir Putin durant la même période.
  • Essayer d’obtenir du support matériel (“material support”) en vue de “pousser” (“push”) pour la présidentielle.
  • Fourniture d’assistance financière, technique, matérielle…

Le contrat stipule qu’il est régi par la loi canadienne, et qu’un litige serait arbitré à Londres.

Le nom de Nabil Karoui, en tant que candidat aux élections, est clairement mentionné plus d’une fois dans le contrat. Par contre, le signataire, Mr. Mohamed Bouderbala, n’est mentionné qu’au niveau de la signature, et il n’est présenté sous aucune fonction particulière.

Mohamed Bouderbala est en fait, pour Nabil Karoui, le “Ifhat Smith” de Ennahdha. À la différence de Ifhat Smith, qu’on a pu trouver et savoir qui elle est (3), Mohamed Bouderbala est un total inconnu. Dans les deux dossiers c’est la même chose qu’on entend des deux parties : Les dirigeants de Ennahdha disent qu’ils ne connaissent pas Ifhat Smith, et Nabil Karoui, ainsi que ses avocats, disent qu’ils ne connaissent pas Mohamed Bouderbala. En effet, dès octobre 2019, l’avocat de Nabil Karoui a nié tout lien avec ce contrat signé avec la firme montréalaise Dickens & Madson ni son fondateur Ari Ben-Menashe (4).

Sauf que le lien entre Nabil Karoui et Ari Ben-Menashe sera rapidement confirmé par ce dernier.

Qui est Ari Ben-Menashe ?

On disait donc que Mr. Ben-Menashe est le deuxième signataire du contrat. À l’inverse de Mohamed Bouderbala, on peut savoir beaucoup de choses sur Ben-Menashe ; c’est une personnalité presque publique.

Il y a énormément de choses écrites et dites sur Ben-Menashe et par Ben-Menashe sur Internet. Sur Wikipedia (5), on peut rapidement comprendre que c’est un personnage extrêmement controversé. C’est un ancien agent de la direction du renseignement militaire israélien pendant au moins 10 ans entre les années 1970 et 1990. Ben-Menashe est aussi un trafiquant d’armes, un homme d’affaires, un lobbyiste… Il parle notamment perse et arabe entre autres, et il a été impliqué dans un grand nombre d’activités de renseignements et de scandales. Il est né en Iran dans une famille de juifs irakiens, et puis il s’est installé en Israel. Sa résidence officielle est maintenant à Montréal.

Ben-Menashe ne fait pas que des affaires propres, mais il ne s’en cache pas. Il est très influent surtout grâce à sa fortune, son carnet d’adresse, et il essaie de respecter la loi. En 1989, il a pris autour d’un an de prison car il a essayé de vendre des avions militaires à l’Iran en violation des sanctions américaines. Au-delà de sa carrière dans le renseignement israélien, il a opéré par exemple dans des pays comme le Zimbabwe, le Sudan, le Kirghizistan, le Vénézuela, et puis dernièrement au Myanmar… En effet, peu après le coup d’état orchestré par les militaires du Myanmar en février 2021, ils ont embauché Ari Ben-Menashe pour embellir leur image et éliminer les sanctions internationales qui leur ont été imposées (6). Le contrat avec la junte a lui aussi été publié en bonne et due forme sur le site du Département de la Justice des États-Unis le 8 mars 2021 ; il est d’un montant de 2 millions de dollars US (7). Mr. Ben-Menashe a justement exécuté ce contrat qui n’a pas l’air d’être un secret pour personne. Le 17 mars 2021, par exemple, Ben-Menashe donne une interview à la BBC, où il explique les raisons et les buts du coup d’État au Myanmar. La BBC mentionne d’ailleurs que ce dernier a signé un contrat de conseil portant le montant de 2 millions de dollars, et mentionne aussi que le gouvernement israélien dit que Mr. Ben-Menashe ne les représente pas (8).

Au Zimbabwe, Ben-Menashe a notamment travaillé pour le président Mugabe, ou encore pour le trafiquant de drogue Paul Le Roux (5), arrêté en 2020 et condamné à 25 ans de prison (9). Le Roux payait Ben-Menashe notamment pour influencer Mugabe afin de mettre la main sur des terres agricoles au Zimbabwe. Un article du Globe and Mail datant de 2008, mentionne que cette activité avait rapporté plus de 14 millions de dollars US dans les poches de Ben-Menashe (10).

Ces détails sont importants pour avoir une idée de qui est le personnage de Ari Ben-Menashe, et pour comprendre la suite des évnements en ce qui concerne sa rencontre avec Nabil Karoui. Ben-Manashe apparaît comme un homme très compétent, efficace, sans trop de scrupule, et aussi avec un grand pouvoir d’influence sur les affaires politiques internationales. C’est justement ces “qualités” qui feront de lui le lobbyiste que Nabil Karoui va embaucher pour accéder à la Présidence et ensuite mener à bien ses plans.

Ben-Benashe présente d’autres atouts majeurs pour Nabil Karoui ; il a des contacts et une influence importante dans les affaires militaires du Soudan et de la Libye voisine. Ben-Benashe a en effet signé, en 2016, un contrat de lobbying avec des représentants du gouvernement de l’est Libyen à Tobrouk, y compris avec le Maréchal Khalifa Haftar. Le contrat est d’un montant de 6 ou 8 millions de dollars US (le montant a été modifié au stylo sur le contrat et est difficilement lisible), et mentionne aussi une assistance technique et la procuration d’équipement militaire de la part de la Russie à hauteur de 500 millions de dollars US. Ce contrat est aussi publié par le Département de la Justice des États-Unis (11). De la même façon, Ben-Menashe a signé un contrat avec le Conseil Transitionnel au Soudan en 2019, d’une valeur de 6 millions de dollars US. Le contrat en question, toujours publié par le Département de la Justice américain, mentionne la procuration de financement et d’armement, et encore une collaboration entre les militaires soudanais et le commandement militaire de l’est de la Libye (12).

“We shall also strive to obtain funding and equipment for the Sudanese military. We will strive to obtain funding for your Council from the Eastern Libyan Military Command in exchange for your military help to the LNA (Libyan National Army).” (12).

Ben-Menashe mentionne d’ailleurs ouvertement ce contrat soudanais ainsi que son support à Khalifa Haftar pour réunifier la Libye dans un entretien à la BBC en juillet 2019 (13). Ainsi, en embauchant Ben-Menashe, il devient de plus en plus évident que Nabil Karoui visait à avoir un soutien international, mais aussi à préparer un agenda politique en ce qui concerne la crise libyenne. C’est d’ailleurs exactement ce qui sera confirmé plus tard par Ben-Menashe lui-même. C’est juste que les choses ne se passeront pas comme prévu ; Nabil Karoui sera arrêté, et perdra les élections présidentielles.

La rencontre de Nabil Karoui avec Ari Ben-Menashe

La descente en enfer de Nabil Karoui va commencer lors de sa première arrestation fin août 2019 pour des accusations de blanchiment d’argent et d’évasion fiscale, mais sa situation va encore s’aggraver lorsque le contrat de lobbying avec Ben-Menashe sera publié par le Départment de Justice américain en septembre 2019 et que l’affaire sera connue en Tunisie en octobre 2019 (14).

La défense de Nabil Karoui va alors clairement dire qu’il n’y a absolument aucune connection entre Nabil Karoui et l’entreprise Dickens & Madson, ni avec Mohamed Bouderbala le signataire du contrat. Dans un article publié le 3 octobre 2019 par Middle East Eye (MEE), la situation semble complètement confuse : personne ne sais rien ! Nabil Karoui ne sait pas qui est Mohamed Bouderbala, Ben-Menashe lui-même dit qu’il n’est pas sûr de rien, sauf qu’il avait déjà reçu un paiement de 250.000 USD sur le compte de Dickens & Madison. Middle East Eye déclare que le Ministère de la Justice des États-Unis n’a pas voulu commenter l’affaire, et la Maison Blanche n’a pas répondu à leur demande non plus (15).

Sauf que 5 jours seulement après l’article de MEE, Ben-Menashe va riposter aux déclarations de la défense de Nabil Karoui, dans une entrevue téléphonique accordée au Globe and Mail le 8 octobre 2019, où il délivrera des informations accablantes pour son client. Dans le Globe and Mail, Ben-Menashe va effectivement affirmer que le contrat de 1 million de dollars est valide et que son entreprise, Dickens & Madison, a déjà reçu un premier paiement de 250.000 USD, ce qui confirme ce qui a déjà été publié par MEE. A propos de ce paiement, Ben-Menashe affirme que 150.000 USD lui ont été transférés directement depuis le compte bancaire de Dubai, de Salwa Smaoui, la femme de Nabil Karoui. Les autres 100.000 USD ont été payé, continue Ben-Menashe, par un intermédiaire algérien qui connaît Nabil Karoui et qui vit à Montréal, sans donner l’identité de ce dernier. Or, d’après un autre document enregistré auprès du Département de la Justice américain, ce dernier serait Mr. Salim Hamdadou ; son nom apparaît noir sur blanc à côté de celui de Salwa Smaoui, avec les montants exactement tels que déclarés par Ben-Menasahe (voici un aperçu de la page 11 du document) (16).

Page 11 (16).

Ben-Menashe affirme par contre qu’il n’a jamais rencontré Mohamed Bouderbala (le signataire du contrat), mais que ce dernier était un représentant de l’avocat de Nabil Karoui. Le Globe and Mail n’a pas non plus réussi à savoir qui était Mr. Bouderbala au juste (17).

Pour ce qui est de Salim Hamdadou, c’est en effet un montréalais d’origine algérienne. Il travaille pour SNC-Lavalin (18), et il a aussi été le Directeur de SNC-Lavalin en Algérie, notamment cité dans des affaires de corruption (19). De toute façon, SNC-Lavalin, une des plus grosses entreprises au Canada, est assez connue pour ses scandales de corruption colossale ; Radio-Canada a consacré toute une enquête en 2013 sur les pots-de-vin distribués par la multinationale notamment en Algérie, en Tunisie ou en Libye (20). Le scandale avait éclaboussé plusieurs dirigeants de l’entreprise dont un Tunisien qui s’est fait connaître pour avoir empoché des millions de dollars de la part de la famille Kadhafi, il s’agit de Riadh Ben Aïssa. Ce dernier a notamment été arrêté en Suisse en 2012. Un article, publié par le Financial Post en 2015, détaille la fortune de Mr. Ben Aïssa, ainsi que ses liens avec Slim Chiboub et Saadi Kadhafi (21). Vous comprendrez que dans ce monde de millions de dollars de corruption, on retrouve souvent les mêmes noms dans les carnets d’adresse de tout le monde. Tout cela est utile pour le reste de cette enquête. Slim Chiboub par exemple, selon la presse canadienne, aurait reçu 5,9 millions de dollars de la part de Mr. Ben Aïssa (22), et on verra bientôt que le clan des Trabelsi ne sera pas loin de l’affaire Karoui et Ben-Menashe, car ces derniers ont certainement de bons contacts chez SNC-Lavalin. D’ailleurs, en 2012, Radio-Canada a publié une enquête accusant Riadh Ben Aïssa d’avoir porté assistance à Belhassen Trabelsi sur le sol canadien (22a).

Ari Ben-Menashe va encore aller plus loin pour démontrer la validité de ce contrat, ainsi que le lien qu’il a avec Nabil Karoui. Dans la même entrevue avec le Globe and Mail, il va clairement dire qu’il a rencontré Nabil Karoui chez ce dernier à Tunis, en donnant des détails. On parle de rencontres à Tunis le 18 et le 19 août 2019, quelques jours avant l’arrestation de Nabil Karoui. Ben-Menashe mentionne que le 19 août, il a eu un dîner chez Nabil Karoui, avec la présence de Ghazi Karoui, le frère, et Salwa Smaoui, l’épouse. Ben-Menashe était accompagné par son assistant(e) et ils auraient discuté, entre autres choses, d’une possible supervision russe des pourparlers libyens sur le sol tunisien.

“Mr. Ben-Menashe said he met Mr. Karoui and his brother Ghazi in Tunis on Aug. 18. The next day, he said, he and his assistant had dinner at the Karoui residence, where they met Mr. Karoui’s wife, his brother and his lawyer. In a note to The Globe, Mr. Ben-Menashe said: “During that evening, Mr. Nabil Karoui was very emotional due to the upcoming anniversary of his son’s death [in a car crash]. He wanted to turn Tunis into a peace centre. He wanted to hire us, not for the election only, but for us to bring the Libyan warring parties together in Tunis with the supervision of [Russian] President [Vladimir] Putin. He believed it was his calling.”” The Globe and Mail (17).

Ari Ben-Menashe ne s’arrête pas à cette déclaration au Globe and Mail, il va aussi donner une entrevue à un certain tuniso-montréalais du nom de Zouhair Taba, vers le 8 octobre. Cette entrevue était supposée être diffusée par la chaîne privée Attassia le 10 octobre 2019, soit juste quelques jours avant le deuxième tour des présidentielles. Mais cette diffusion a finalement été annulée et n’aura jamais lieu. Zouhair Taba a lui-même diffusé l’entrevue sur YouTube, avant de la supprimer par la suite pour des raisons inconnues. Mr. Taba a d’ailleurs indiqué que, suite à leur demande, il a procuré aux autorités judiciaires tunisiennes la vidéo de l’entrevue en question, et ce dès octobre 2019 (23).

Sauf que la vidéo de l’entrevue est encore trouvable sur YouTube, sur la page d’un certain Khedhiri Salah dont on ne connait rien. Elle est d’une durée de 30 minutes, et on y voit Ben-Menashe donner encore plus de détails sur sa rencontre avec Nabil Karoui, son frère Ghazi et sa femme Salwa. Tout ce que Ben-Menashe racontera dans cette vidéo sera en parfaite concordance avec ce qu’il avait déclaré au Globe and Mail (17), et toutes les choses qu’il dira à propos de son influence au Soudan et en Libye sont aussi corroborées par les contrats qui portent son nom et dont nous avons ici déjà parlé (11) (12) (13).

Dans cette entrevue, Ben-Menashe va détailler les débats qu’il a eu à Tunis, donnant même le nom de l’hôtel où son assistante et lui sont allés, et même ce qu’ils ont mangé chez Nabil Karoui, des sushis, sans parler de tous les plans politiques de Nabil Karoui.

On apprend alors qu’il y avait en fait deux contrats, le premier étant signé avec une entreprise au Royaume-Uni, et qu’il était signé par Youssef Zarrouk ; nous n’avons aucune trace de contrat. Le deuxième contrat, dit Ben-Menashe, n’est qu’un contrat miroir du premier. Ben-Menashe mentionne surtout que Youssef Zarrouk était bien présent avec eux lors de cette soirée de dîner à la résidence de Nabil Karoui. Il s’agit ensuite de plusieurs histoires incroyables qui sont arrivées lorsque Nabil Karoui a été arrêté, et notamment la gestion chaotique du contrat qu’il fallait payer au complet et enregistrer aux États-Unis afin d’essayer de sortir Nabil Karoui de prison. C’est là que les ennuis vont commencer pour Ben-Menashe parce que les représentants de Karoui vont dire et redire que ce contrat est une fraude. Ben-Mensahe reçoit alors un appel du Département de la Justice américain pour savoir ce qu’il en est… Ben-Menashe apparaît alors agacé par ce qu’il appelle “l’incompétence” et la “stupidité” de l’équipe de Nabil Karoui ; il dit : “En disant des mensonges et rien que des mensonges de cette manière, ils viennent de se mettre dans une impasse”. Car en effet, dira Ben-Menashe, pour qu’il puisse aider Nabil Karoui à sortir de prison, il faudra avant tout que son équipe sur place arrêtent de mentir. Il dira aussi de qu’il pourra aider Nabil Karoui à créer une coalition avec les islamistes, car cela serait à son avantage.

Entrevue de Ben-Menashe, autour du 8 octobre 2019, pendant que Nabil Karoui est en prison (23a).

En janvier 2020, Ben-Menashe dira à Al-Monitor, que grâce à des amis aux États-Unis, il a été en mesure d’obtenir la libération de Nabil Karoui juste avant les élections. Il ajoutera aussi que c’était Youssef Zarrouk qui lui avait promis de payer le 1 million de dollars, mais qu’il ne s’attendait plus de recevoir les 750.000 dollars qui manquaient (24). Ben-Menashe n’était décidément pas content de la façon avec laquelle ce contrat a été géré, et il a décidé de dire des faits et des noms.

On notera aussi que Ben-Menashe précise dans la vidéo que Nabil Karoui était sûr de remporter les élections, et que le contrat qu’il a signé avec lui n’est pas pour les élections, mais plutôt pour l’aider à réaliser les objectifs de sa présidence une fois qu’il est élu. Or cela est complètement faux. Il est écrit noir sur blanc dans le contrat que le lobbying servira à atteindre la présidence (in order to attaining the Presidency of the Republic of Tunisia.” peut-on y lire) (2). Cela est vraisemblablement un mensonge de Ben-Menashe pour protéger son client de poursuites judiciaires sachant très bien que le financement étranger de campagnes électorales est strictement interdit.

Qui est Youssef Zarrouk ?

On disait donc que Youssef Zarrouk était vraisemblablement présent chez Nabil Karoui avec Ghazi Karoui, Salwa Smaoui et Ari Ben-Menashe le 19 août 2019, et qu’il aurait signé le premier contrat de 1 million de dollars au profit de son ami Nabil Karoui. Alors, qui est-il ?

Youssef Zarrouk est un personnage bien connu des milieux des affaires et de la politique en Tunisie depuis des décennies. Il est l’oncle de Zohra Jilani, qui est la femme de Belhassen Trabelsi, et qui est aussi la fille de Hédi Jilani, ancien président de la puissante UTICA (Union Tunisienne de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat) (25).

Youssef Zarrouk était un proche de Ben Ali, de Slim Chiboub et bien évidemment des Trabelsi. Il le déclare lui-même qu’il se fait payer comme intermédiaire qui connecte des entreprises avec des clients (25). En quelque sorte, l’activité de Youssef Zarrouk ressemble à celle de Ari Ben-Menashe, à la croisée du lobbying, des commissions, de la corruption et du trafic d’armes et d’influence.

Plusieurs sources notent la proximité de Youssef Zarrouk avec Charles Pasqua, ancien ministre de l’intérieur en France dans les années 80 et 90 (25a) (25b). Charles Pasqua a notamment été accusé et condamné en France pour plusieurs affaires de corruptions et de lobbying illégal (26). Pasqua venait aussi passer ses vacances en Tunisie dans la maison de Youssef Zarrouk à Sidi Bou Said. Tout un chapitre est consacré à “Papy Zarrouk” dans un livre publié aux éditions du Seuil en 2012, par des journalistes de Médiapart, Lénaïg Bredoux et Mathieu Magnaudeix (27). Le livre s’appelle “Tunis Connection – Enquête sur les réseaux franco-tunisiens sous Ben Ali” (28). On peut y trouver plusieurs détails sur le “travail” de Youssef Zarrouk en tant qu’intermédiaire dans toutes sortes de domaines : équipements militaires, laboratoires, nucélaire, aéronautique (27).

Youssef Zarrouk sait se faire très discret, sauf que son nom sera médiatisé dans plusieurs journaux internationaux et notamment au Canada et en Afrique du Sud dans les années 2012. Cela arrivera suite à une énorme affaire de corruption qui éclaboussera l’entreprise canadienne Bombardier. Dans un article de La Presse canadienne en 2012, on lira (29) :

“Un porte-parole de Bombardier Transport a reconnu hier avoir retenu les services de Youssef Zarrouk. À la tête de la All Trade Company, Youssef Zarrouk est décrit par le Mail & Gardian comme un entremetteur pour les grands projets et les ventes d’armes internationales proche du président déchu Ben Ali.”

Montant de la commission : 35 millions de dollars ! Youssef Zarrouk a joué l’intermédiaire entre Bombardier et les décideurs en Afrique du Sud, pour un projet ferroviaire (le Gautrain) de 3,5 milliards de dollars. L’affaire a d’abord été révélée par le journal d’investigation sud-africain Mail & Guardian (30), et a fait ensuite scandale au Canada. Mr. Zarrouk n’a pas vraiment été inquiété, ni Bombardier d’ailleurs ; tout est fait dans la légalité.

Plus intéressant encore, Youssef Zarrouk affirme lui-même qu’il a eu la visite de deux agents de la GRC (la Gendarmerie Royale du Canada, le FBI canadien si vous voulez) à Tunis. Ces derniers voulaient l’interroger sur ses transactions avec Bombardier, mais aussi avec SNC-Lavalin, l’entreprise où figurent les noms de Salim Hamdadou et Riadh Ben Aïssa. Les journalistes du Globe & Mail, ont eux-mêmes vérifié si des agents de la GRC se sont déplacés à Tunis pour interroger Youssef Zarrouk, et ils ont confirmé que cela était bien vrai (31).

Vous voyez qu’il n’y a absolument plus aucun doute que des personnages comme Youssef Zarrouk, Nabil Karoui, Riadh Ben Aïssa et Salim Hamdadou se connaissent tous, et agissent en bande organisée. On peut aussi rajouter le nom de Belhassen Trabelsi, malgré que son nom n’apparaît directement pas dans cette enquête.

En juillet 2019, on peut lire sur Nessma, la chaîne télé de Nabil Karoui (32) :

Youssef Zarrouk affiche ses choix pour la présidentielle
Youssef Zarrouk faisant campagne pour Nabil Karoui

“L’homme d’affaires, écrivain et poète aussi, Youssef Zarrouk est connu pour son franc-parler et pour son honnêteté intellectuelle. C’est un patriote convaincu qui aime la Tunisie plus que tout et qui la défend à sa manière, par tous les moyens dont il dispose, mais toujours dans le respect de ses propres convictions.
(…)
Parlant de Nabil Karoui, il écrit ‘’Mon ami veut rendre la révolution à ceux qui l’ont initiée. Le pays oublié, les chômeurs humiliés, les enfants mal soignés et j’en passe. Sa proximité avec les pauvres me le rend plus proche…”

Cité dans le scandale mondial des évasions fiscales des Swiss Leaks en 2015, le “patriote” Youssef Zarrouk affirme très honnêtement au journal Le Monde qu’il n’est pas “résident en Tunisie” et qu’il n’est “assujetti ni au fisc tunisien, ni au fisc français”. Le compte qu’il avait à la HSBC Private Bank depuis 2006 a atteint plus de 3 millions de dollars, avant d’être fermé vers 2010. Et ce n’est qu’un parmi plusieurs comptes qu’il possède à l’étranger comme il le déclare lui-même au Monde (33). Voilà l’affaire est simple ; Youssef Zarrouk, comme la plupart des millionnaires du monde, agit le plus souvent possible dans la légalité.

Youssef Zarrouk a d’ailleurs une entreprise enregistrée à Esch-sur-Alzette au Luxembourg depuis 2015, avec Mr. Ghazi KORTOBI comme associé (50%-50%). Tout est bien enregistré au registre de commerce et des sociétés de Luxembourg. L’entreprise s’appelle “LTC (LUXEMBOURG TRADING COMPANY)”, et on peut lire (34) :

“La société pourra faire toutes opérations commerciales, financières, industrielles, mobilières ou immobilières, se rattachant directement ou indirectement en tout ou partie à son objet ou qui pourraient en faciliter la réalisation et le développement.

Elle pourra également prendre des participations dans d’autres sociétés, luxembourgeoises ou étrangères.”

L’adresse de Mr. Kortobi apparaît alors au Luxembourg, et celle de Mr. Zarrouk au :
TN-2028 Sidi Bou Said, 8 Rue Hedi Zarrouk.

Youssef Zarrouk avait aussi une entreprise enregistrée au Royaume-Uni depuis 2007, elle s’appelle “CHAMS YACHTING LTD”, dissoute en 2015 (35). Sauf que cette fois, l’entreprise est déclarée comme constituée par “London Law Secretarial Limited” (36), et gérée par “London Law Services Limited”. Curieusement, 2 mois après l’incorporation de l’entreprise, la direction (London Law Services Limited) démissionne (37), et le nouveau directeur devient un certain Zarrouk Youssef Nabhani de nationalité tunisienne (38). Zarrouk Youssef Nabhani a exactement la même date de naissance de Youssef Zarrouk (le 5 août 1944) telle que publiée par les sources luxembourgeoise citées précédemment (34). Nabil Karoui aussi, comme son ami Youssef Zarrouk, a une entreprise au Luxembourg, elle s’appelle Karoui & Karoui Luxe S.A., enregistrée depuis 2008 (39). Au-delà du Luxembourg et du Royaume-Uni, il y a aussi des indices qui indiquent que Youssef Zarrouk aurait une entreprise au Panama (40).

Le Facebook de Youssef Zarrouk regorge d’information intéressantes sur le personnage. Voici quelques échantillons, où je mettrai en gras les mots-clés les plus intéressants (41).

  • Le 19 octobre 2019 (quelques jours après la défaite de Nabil Karoui) :

    “Fier d’appartenir à Qalb Tounès , arrivé deuxième aux législatives et heureux d’être le compagnon de route d’un candidat diabolisé . Nous avons tous fait de notre mieux , nous avons couru devant un rouleau compresseur et nous avons réussi à réunir plus d’un million de votants . Nous serons fidèles à nos électeurs , nous garderons le cap sur la lutte contre la pauvreté , demain vous verrez les camions de Khallil Tounès sillonner de nouveau le pays . Nous resterons ce que nous avons toujours été , proches du cœur de la Tunisie profonde . Je fais confiance à Nabil karoui , il trouvera les mots justes pour galvaniser ses troupes et garder toute sa cohésion à notre formation politique . D’ici peu nous serons rejoints à l’assemblée par des femmes et des hommes de bonne volonté qui parlent le même langage que nous , celui du cœur . La vraie , la seule force de Qalb Tounès c’est sa proximité avec les pauvres , ceux qui souffrent n’ont que trop attendu , alors laissons tomber les marchandages politiques et allons vite nous occuper de ceux que nous aimons.”

  • Le 19 novembre 2019 (après le vote à l’assemblée de Qalb Tounes pour Rached Ghannouchi) :

“Bonjour ,
Beaucoup de mes amis me demandent de prendre position sur le vote de Qalb Tounès pour RG . Je veux dire d’emblée que la décision du parti était concertée . Beaucoup de nos députés ont voté à contre cœur , la mort dans l’âme . J’étais pour le vote , l’intérêt du pays l’exigeait . NK ne pouvait pas laisser RG faire alliance avec les va-t-en guerre et ceux qui veulent mettre les ambassadeurs en prison . Avec nos alliés nous avons les deux vice-présidences de la l’ARP , deux positions à partir desquelles nous résisterons . Il y avait un choix à faire RG à l’assemblée ou au gouvernement , nous avons tranché .
Nous avons été consultés pour le choix du chef du gouvernement notre président a avancé le nom de deux ou trois personnes compétentes , le parti en face voit les choses autrement , nous allons dans les prochains jours participer à la formation d’un gouvernement où nous imprimerons notre ADN pour soulager la Tunisie qui souffre . Nous restons fidèles à nos engagements , notre parti va devenir le premier parti de ce pays . En quatre mois et sans moyens nous avons réussi à être les seconds en nombre de députés , notre président qui n’a pas été épargné a réuni plus d’un million de voix à l’élection présidentielle . Je lui sais gré d’avoir défendu nos valeurs et d’avoir maintenu sa cohésion . Nous avons été traînés dans la boue pendant la campagne , et aujourd’hui on essaye de nous faire porter le chapeau d’une alliance qui serait déshonorante , que néni , nous sommes dans le respect de la démocratie , conscients de notre responsabilité et fiers de servir notre patrie . J’inciterai mon parti à voter la confiance à M . Jomli si son gouvernement est fait de compétences . Si les équilibres sont respectés dans un esprit non partisan . La Tunisie a trop souffert , sa jeunesse a trop attendu et ses pauvres sont devenus plus pauvres et plus nombreux . Les nervis de tous les partis qui bombent le torse et font du chantage un moyen de négociation en seront pour leurs frais . Ils se trompent de pays et d’époque . Nous sommes désormais en démocratie , tenus de respecter nos adversaires et de parler avec eux .
Ce post n’engage que moi . Je l’écris en espérant que les réactions resteront respectueuses , je ne répondrai pas aux insultes qui sont devenues monnaie courante .
Vive la Tunisie !”

  • Le 22 novembre 2019

    “Deux hommes ont compris l’enjeu , Kais Saïd le professeur de droit qui sillonnait le pays pour mieux comprendre la jeunesse et Nabil Karoui qui allait partout pour combattre la misère . Le premier a été porté triomphalement en haut des marches . Le second a été diabolisé , jeté en prison et en pâture aux chiens . Son seul tort était d’être premier dans les sondages , l’injustice a été réparée par un jugement qui fera date .
    Explosé , piétiné ,traîné dans la boue le parti crée par NK en quelques heures a conquis la deuxième place en quelques semaines . Au grand dam des partis classiques riches et structurés . J’étais de cette aventure et je m’en réjouis . Entouré d’une bande d’amis plus compétents que moi , plus jeunes je partageais leur enthousiasme et la fidélité au chef . J’ai trouvé le parti que j’ai toujours cherché , du cœur , proche des pauvres et plein d’imagination .”
  • Le 30 juillet 2021 (donc après la fermeture du parlement) :

    “Pour l’amour de l’Unique , pour l’amour de notre patrie , pour tous les déshérités qui gémissent restons unis . La voix du peuple est Ta voix . Suivons le guide que le peuple a choisi et qu’Allah le touche de sa grâce . Kaïs Saïd est un vrai patriote , prions pour qu’Allah lui inspire les bons choix .
    Vive la Tunisie .”

Brève conclusion à propos du contrat de lobbying de Nabil Karoui

Il n’y a presque aucun doute que ces 4 personnes se connaissent :

  1. Youssef Zarrouk.
  2. Riadh Ben Aïssa, le Tunisien condamné dans le scandale de SNC-Lavalin, Montréal (21) (22).
  3. Salim Hamdadou, l’Algérien employé de SNC-Lavalin qui a payé une part du contrat à Ben-Menashe (16) (18).
  4. Nabil Karoui.

Nabil Karoui, son frère Ghazi, sa femme Salwa Smawi et Youssef Zarrouk se sont rencontrés avec le lobbyiste Ari Ben-Menashe le 19 août 2019, pour discuter de leurs plans pour la Tunisie et pour signer le contrat de 1 million de dollars avec lui (17) (23a).

Salwa Smaoui et Salim Hamdadou ont payé Dickens & Madson, l’entreprise de Ben-Menashe via des comptes étrangers (16).

L’alliance nécessaIre Ghannouchi – Karoui

Photo publiée le 2 septembre 2020 – Les 3 chefs de groupes parlementaires avec le dernier Chef de Gouvernement qu’ils auront appuyé (42).

La loi sur le financement étranger de campagnes électorales est très explicite. Rappelons ici l’article 80 de la Loi relative aux élections et aux référendums (1) que nous avons déjà mentionné au tout début de cette enquête :

“Art. 80 – Il est interdit de financer la campagne électorale par de sources étrangères, y compris les gouvernements, les individus et les personnes morales. Est réputé financement étranger, tous les biens sous forme de don, cadeau, ou subvention en numéraire, en nature ou de propagande dont l’origine est étrangère conformément à la législation fiscale, et ce, quelle que soit la nationalité du financeur.

N’est pas réputé financement étranger, le financement des listes de candidats aux circonscriptions électorales à l’étranger par les Tunisiens à l’étranger.

L’Instance fixe les règles, procédures et modes de financement qui prennent en compte les spécificités du financement des listes de candidats aux circonscriptions électorales à l’étranger.”

L’article 163 de la même loi précise aussi que, en cas d’obtention de financement étranger, il y a des amendes à payer, les députés perdent leur mandat, et le candidat à la présidence écope de 5 ans de prison. Voici le texte exact (1) :

“Art. 163 – Sous réserve des dispositions de l’article 80, s’il est avéré pour la Cour des comptes que le candidat ou la liste de candidats a obtenu un financement étranger pour sa campagne électorale, elle l’oblige à payer une amende allant de dix fois à cinquante fois la valeur du financement étranger.

Les membres de la liste ayant bénéficié d’un financement étranger perdent leur mandat au sein du conseil élu. Le candidat aux élections présidentielles ayant bénéficié d’un financement étranger est condamné à une peine d’emprisonnement de cinq ans.

Quiconque, qu’il soit membre d’une liste ou candidat, aura été condamné pour avoir perçu un financement étranger pour sa campagne électorale, n’est plus éligible pendant cinq ans à compter de la date du prononcé du jugement de condamnation.”

Une application de cette loi sur Ennahdha et Qalb Tounes implique que tous leurs députés devraient être suspendus du parlement, ne pourraient plus être éligibles pendant 5 ans, en plus des amendes qu’ils devraient payer. Dans le cas de Nabil Karoui, étant donné qu’il s’était présenté à la présidence, il devrait aussi écoper d’une peine de 5 ans d’emprisonnement.

Pendant la campagne électorale de l’année 2019, Rached Ghannouchi a dit à plusieurs reprises qu’il ne se rapprochera pas de Nabil Karoui, le désignant de “corrompu” (43). De la même façon, Nabil Karoui a dit à plusieurs reprises qu’il ne fera jamais coalition avec Ennahdha. Sauf qu’aucun des deux partis ne pouvait gouverner tout seul, et aucun des deux partis ne pouvait se permettre de rester dans l’opposition et perdre le contrôle de l’appareil exécutif ; pour cause, les deux partis sont dans l’illégalité.

Sauf qu’une coalition Ghannouchi – Karoui aura des conséquences dramatiques sur leurs bases électorales, qui y verront une véritable trahison. Le prix politique à payer pour une telle coalition est donc assez élevé, et cela, Rached Ghannouchi et Nabil Karoui le savaient très bien. En effet, les électeurs de Ennahdha veulent rompre avec le système Ben Ali et la corruption des Trabelsi, et du point de vue de la politique étrangère, ils sont dans le même camp du gouvernement libyen à Tripoli tel qu’il était reconnu officiellement par la communauté internationale et soutenu notamment par la Turquie et le Qatar. De son côté, Nabil Karoui était exactement dans le camp “ennemi”. Avec Ari Ben-Menashe, il avait déjà pris le camp du Général Khalifa Haftar en Libye, qui est lui-même rappelons-le client de Men-Menashe. Et puis Nabil Karoui est aussi un ancien du système Ben Ali, proche des Trabelsi et plongé dans le blanchiment d’argent et l’évasion fiscale. La présence de Youssef Zarrouk à ses côtés pendant la rencontre avec Ari Ben-Menashe, mais encore tout le long de sa campagne électorale résume le portrait d’un candidat parfaitement détesté par ceux qui votent pour Ennahdha.

En bref, une coalition entre Rached Ghannouchi et Nabil Karoui, malgré qu’elle leur faisait perdre leur crédibilité chez leurs électeurs respectifs, était quand-même un moindre mal pour les deux hommes. C’était une coalition nécessaire pour garder le contrôle sur l’exécutif et particulièrement sur l’appareil judiciaire. L’affaire des financements étrangers de leurs campagnes électorales était connue des médias, ainsi que de l’opinion publique, et était aussi dans les dossiers des juges dans les tribunaux, mais rien n’a été fait. Nabil Karoui a eu des ennuis à causes de ses affaires de blanchiment d’argent et d’évasion fiscale, mais il n’a pas été inquiété par rapport au contrat signé avec Ben-Menashe. De la même façon, Ennahdha n’a jamais été inquiété pour ses sources financières étrangères, ni par rapport à Ifhat Smith. Cette alliance nécessaire entre les deux partis a en quelque sorte réussi à les protéger, jusqu’au 25 juillet 2021, lorsque Kais Saied, le Président de la République a soudainement décidé d’envoyer les forces armées pour fermer le parlement, et de s’accaparer tous les pouvoirs. Au moment où j’écris cette dernière ligne, en août 2021, Nabil Karoui est apparemment en fuite, et Rached Ghannouchi, ainsi que son parti, dans une grande crise politique et judiciaire.

Sources :

(a). Foreign Agents Registration Act (FARA), USA.
https://en.wikipedia.org/wiki/Foreign_Agents_Registration_Act

(1). Loi organique n° 2014-16 du 26 mai 2014, relative aux élections et aux référendums, du site web de la think tank swisse DCAF (Centre de Genève pour la gouvernance du secteur de la sécurité) :
https://legislation-securite.tn/fr/law/44286

(2). Le contrat de lobbying de Nabil Karoui sur le site du Département de la Justice des États-Unis.
https://efile.fara.gov/docs/6200-Exhibit-AB-20190930-12.pdf?fbclid=IwAR2FuGhOdKCj7M2fb8yX73y5_cCnYlhIq4D3PRa3dbV99bQvIXo2v-fGQpw

(3). Enquête sur Ifhat Smith.
https://nadim-m.com/2021/08/06/ifhat-smith-le-relais-londonien-de-ennahdha-avec-bcw-new-york/

(3a). Contrat de lobbying de Ennahdha en vue des élections du 26 octobre 2014.
https://efile.fara.gov/docs/6227-Short-Form-20140918-18.pdf
https://efile.fara.gov/docs/6227-Short-Form-20140918-16.pdf
https://efile.fara.gov/docs/6227-Short-Form-20141009-22.pdf
https://efile.fara.gov/docs/6227-Short-Form-20140919-20.pdf

(3b). Contrat de lobbying de Ennahdha en vue des élection du 6 octobre 2019.
https://efile.fara.gov/docs/6227-Supplemental-Statement-20160511-2.pdf

(3c). Contrat de lobbiying de Ennahdha en vue des élections du 26 octobre 2014, portant le nom de Ifhat Smith.
https://efile.fara.gov/docs/6227-Exhibit-AB-20140918-5.pdf

(4). Jailed Tunisian presidential candidate has ‘no connection’ to $1m lobbying contract, Middle East Eye (3 octobre 2019).
https://www.middleeasteye.net/news/canadian-lobbying-firm-hired-elect-jailed-tunisian-presidential-candidate

(5). Ari Ben-Menashe sur Wikipedia.
https://en.wikipedia.org/wiki/Ari_Ben-Menashe

(6). Myanmar military hires PR agent to explain ‘real situation’ to west, The Guardian (Mars 2021).
https://www.theguardian.com/world/2021/mar/07/myanmar-hires-pr-agent-to-explain-real-situation-to-western-leaders

(7). Le contrat de Ari Ben-Menashe avec les militaires du Myanmar, publié au Département de la Justice américain.
https://efile.fara.gov/docs/6200-Exhibit-AB-20210308-17.pdf

(8). Ari Ben Menashe on Myanmar, BBC (17 mars 2021).
https://www.bbc.co.uk/programmes/p09b17pv

(9). Page Wikipedia de Paul Le Roux.
https://en.wikipedia.org/wiki/Paul_Le_Roux

(10). Canadian received millions to broker Zimbabwe land deals, The Globe and Mail (2008).
https://www.theglobeandmail.com/news/world/canadian-received-millions-to-broker-zimbabwe-land-deals/article656275/

(11). Contrat de Ben-Manashe avec Khalifa Haftar et ses alliés en Libye (2016).
https://efile.fara.gov/docs/6200-Exhibit-AB-20160720-4.pdf

(12). Contrat de Ben-Menashe avec le Conseil Transitionnel du Soudan (2019).
https://efile.fara.gov/docs/6200-Exhibit-AB-20190617-8.pdf

(13). Entretien de Ben-Menashe avec la BBC à propos du Soudan et de Khalifa Haftar (2019).
https://www.bbc.co.uk/programmes/p07g0b3n

(14). Révélations sur le lobbying international pour la campagne électorale de Nabil Karoui, Kapitalis (3 octobre 2019).
http://kapitalis.com/tunisie/2019/10/03/revelations-sur-le-lobbying-international-pour-la-campagne-electorale-de-nabil-karoui/?fbclid=IwAR23Umj7FQCBbesr7-Hbt8GMRnu3Cpv6MgckLtO89SkfkTmXioNfynEcreI

(15). Jailed Tunisian presidential candidate has ‘no connection’ to $1m lobbying contract, MEE (3 octobre 2019).
https://www.middleeasteye.net/news/canadian-lobbying-firm-hired-elect-jailed-tunisian-presidential-candidate

(16). Document du Département de la Justice, avec les paiements de Salwa Smaoui et Salim Hamdadou.
https://efile.fara.gov/docs/6200-Supplemental-Statement-20200121-12.pdf

(17). Canadian lobbyist Ari Ben-Menashe’s contract triggers a storm in the Tunisian presidential election, The Globe and Mail (8 octobre 2019).
https://www.theglobeandmail.com/world/article-canadian-lobbyist-ari-ben-menashes-contract-triggers-a-storm-in-the/?fbclid=IwAR3GcOUwvp2DgBbJqbNTjhB8usmhHP3oL8v236JqbwD4_5c0bcBL46bC1e4

(18). LinkedIn de Salim Hamdadou.
https://www.linkedin.com/in/salim-hamdadou-86a22a112/?originalSubdomain=ca

(19). SNC-Lavalin en Algérie et les affaires de corruption.
https://algeria-watch.org/?p=7651

(20). Au coeur du système secret de SNC-Lavalin, Radio-Canada (2013).
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/638158/snc-lavalin-empire-afrique-nord-pots-de-vin-enquete

(21). Inside the ‘clandestine world’ of SNC-Lavalin’s fallen star Riadh Ben Aissa, Fianancial Post (2015).
https://financialpost.com/legal-post/inside-the-clandestine-world-of-snc-lavalins-fallen-star-riadh-ben-aissa

(22). L’ex-cadre de SNC-Lavalin Riadh Ben Aïssa reconnu coupable de corruption, Radio-Canada (2014).
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/687124/riadh-ben-aissa-snc-lavalin-coupable

(22a). Un ex-haut dirigeant de SNC-Lavalin aurait aidé Belhassen Trabelsi, Radio-Canada (2012).
https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/549495/tunisiebenali-snc-lavalin-westmount

(23). L’enregistrement de l’interview avec le lobbyiste Ari Ben Menashe entre les mains de la justice (Taba), GnetNews (octobre 2019).
https://news.gnet.tn/lenregistrement-de-linterview-avec-ari-ben-menashe-entre-les-mains-de-la-justice-taba/

(23a). L’interview sur YouTube de Ari Ben-Menashe.
https://youtu.be/NAqhaa26qzk

(24). Defeated Tunisian presidential candidate paid ex-Israeli intelligence official $250,000, Al-Monitor (2020).
https://www.al-monitor.com/originals/2020/01/nabil-karoui-lobbyist-tunisia-mossad-ari-ben-menashe.html

(25). SwissLeaks : que révèlent les listings tunisiens ? Le Monde (2015).
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/02/11/swissleaks-que-revelent-les-listings-tunisiens_4574435_3212.html

(25a). Bombardier, Bouygues et des pots-de-vin ? Le Monde (2012).
https://www.lemonde.fr/afrique-du-sud/article/2012/06/04/bombardier-bouygues-et-des-pots-de-vin_5991066_1656665.html

(25b). Regime Elites and Transitions from Authoritarian Rule: A Comparative Analysis of the Tunisian and Egyptian Uprisings, Ian Kelly BA, MA, School of Law and Government, Dublin City University (2016).
https://core.ac.uk/download/pdf/77222252.pdf

(26). Page Wikipédia de Charles Pasqua.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Pasqua

(27). Qui est l’intermédiaire Youssef Zarrouk ? Kapitalis (2018).
http://kapitalis.com/tunisie/2018/08/02/qui-est-lintermediaire-youssef-zarrouk/

(28). Tunis Connection – Enquête sur les réseaux franco-tunisiens sous Ben Ali (2012).
https://www.seuil.com/ouvrage/tunis-connection-lenaig-bredoux/9782021059465

(29). De commissions et de bakchichs, LaPresse.ca (2012).
https://www.lapresse.ca/debats/201206/01/01-4531019-de-commissions-et-de-bakchichs.php

(30). Gautrain’s customer ‘capture plan’, Mail & Guardian (2012).
https://mg.co.za/article/2012-06-08-gautrains-customer-capture-plan/

(31). The Price of Success, The Globe and Mail (2017).
https://www.augustinlegall.com/recent-works/2017/12/25/portrait-of-youssef-zarrouk-for-the-globe-and-mail

(32). Youssef Zarrouk affiche ses choix pour la présidentielle, Nessma (juillet 2019).
https://www.nessma.tv/fr/nationale/actu/youssef-zarrouk-affiche-ses-choix-pour-la-presidentielle/153137

(33). SwissLeaks : que révèlent les listings tunisiens ? Le Monde (2015).
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/02/11/swissleaks-que-revelent-les-listings-tunisiens_4574435_3212.html

(34). Open Gazettes – L’entreprise de Youssef Zarrouk au Luxembourg (2015).
http://opengazettes.com/gazette_notices/331437456

(35). CHAMS YACHTING LTD, l’entreprise de Youssef Zarrouk à Londres.
https://find-and-update.company-information.service.gov.uk/company/06340343

(36). Incorporation de Chams Yachting LTD à Londres.
https://s3.eu-west-2.amazonaws.com/document-api-images-live.ch.gov.uk/docs/fuTc7tzvtPFzzvBwhUs_NZoQN9x_oo_cCqFXSO6TBRE/application-pdf?X-Amz-Algorithm=AWS4-HMAC-SHA256&X-Amz-Credential=ASIAWRGBDBV3NNPNUQK4%2F20210818%2Feu-west-2%2Fs3%2Faws4_request&X-Amz-Date=20210818T230305Z&X-Amz-Expires=60&X-Amz-Security-Token=IQoJb3JpZ2luX2VjEG4aCWV1LXdlc3QtMiJHMEUCIQD10ohKf8zNmIVqBHVSdpL2M5n%2BDFGjJ6fhN%2Fo5ePDnywIgFzmciTflov9NEmOcMxqM0Io9tAJPl20OGhEZS0d5d%2FcqgwQIl%2F%2F%2F%2F%2F%2F%2F%2F%2F%2F%2FARADGgw0NDkyMjkwMzI4MjIiDOUVH3oOim0huWZUNirXA9L6TWTB8PNog91MpacCDUO9w50s6VenW1ahItAVfi0vPev%2FX%2B9%2BqvRRM728c3KTMCQlwgt8bo3tEv7o%2FyWoNDd%2BGkL5REtjtmjUXlO8l1YMHuMeVx7IvdR5lIkZu%2BhDDYqzINz4m0xxP4RC0KQQ1%2BKtcJv93vxLMwdGh1KzerUkRJRjIf8IeZaOtzGzH7pU%2FIfhrIxgO4vKRTSfywgjC2qBzu7pkikUXjyvPMyVnfvrAPMA8hF9%2BGEMJcLbpUbiYdNIG4LYKgBvXCiDOYAV7THTpvehYzaRAClUM8bClQ8pKlrBY9CyFsL8mwAjlqhyXE70Wy%2F8EksF%2BdYMQQqwHjAv6IAGBOr%2B9Aad46aBFysANI8wRfaTwE2LQe%2F22%2FnSM5y6bSLv6Aebx61X%2BcJs8R4tGtIMXQc9u4SpjYk3b2Pb8h3J4aZoBA%2B6sZeN5%2B7tBUp%2FkEbU2QSqA6paCd7G8Bl824nakIhS%2FNCKKiw16fcuN%2F3%2FOq3xGTfntN6f7GUL9Le1X4VgvE%2FxTiQvfEULh26BTDkYuTHFM9jpCpvP7aKo0rblp4SWgPmYvpaJq6ZRW%2FN2HRvhTuUWQuaQZUdLSCdNqkEJJE65%2BIPMbxjmOi8AOwnPw0x3%2FjDT%2F%2FWIBjqlAYE1%2Fl52XVolBmy%2FVNipKZLfgt5EOCKXMEDKQ1T%2FrIUxlJT%2FstUKBhXDEnSFp3T8jWJpOasV6QHHJ%2FplsFPkOts2f1RjruewKR0ASzwL%2FAXBDj3CX9HYu7p5omyDvtyZHR4UXj7ySMzemgUjuInqzewrbZL%2FNdpthZqMhj75dsh5Vc4%2FudlAbeliZ1EJbjmx3siqPax4%2BKhiiydUn9Hv5ZGx0qrjDQ%3D%3D&X-Amz-SignedHeaders=host&response-content-disposition=inline%3Bfilename%3D%22companies_house_document.pdf%22&X-Amz-Signature=bd026d4ac8165b50f56c685bb75a2db26281c09a408476660edb654daade1ece

(37). Démission de la direction de Chams Yachting LTD.
https://s3.eu-west-2.amazonaws.com/document-api-images-live.ch.gov.uk/docs/vLo7jropJhLgJDTZYUDUqofc-oRVhU5oXKIssrRiVlU/application-pdf?X-Amz-Algorithm=AWS4-HMAC-SHA256&X-Amz-Credential=ASIAWRGBDBV3JXJHXTES%2F20210818%2Feu-west-2%2Fs3%2Faws4_request&X-Amz-Date=20210818T230146Z&X-Amz-Expires=60&X-Amz-Security-Token=IQoJb3JpZ2luX2VjEGwaCWV1LXdlc3QtMiJGMEQCICXgmQvTFucpFyFZybTDoEE39x8zhWqyGPmlEVq4KbS9AiBBY9ssjzTyQLGTKV2H4tkPXpqOgBonYJrjqXBYwCVtYSqDBAiV%2F%2F%2F%2F%2F%2F%2F%2F%2F%2F8BEAMaDDQ0OTIyOTAzMjgyMiIMoZvsXIUMwLp%2FntSJKtcDNyMTR1IBNmZ8N709XxOmq8bS9INNw6t4eaSWqmq1jLr%2FEp8%2BLLi4rtP4msH8ZFdPtuxsODZtcayE1thcBxe6EsEQVA%2F7bSlY7v5Bqc9C453NLP%2BTfGICs%2Blq9lVJa42BDjWTFKi4Rf%2BW5IUqfYNUKdN%2FyM8KtbgkCzvCpafYsY3jKNLtSnBUv2KLc50Xlp58R0cEcNgAVvaaNPGpbq%2FKUd%2FjNl6EdSgvv6TQvt86LmDYxA9ZVAhViHrMT3xf2Eywu5Nx3PvgLXTXsVHwhXVLAr6ce1PQYVDk1uK5WXd6r89fwkrytiX4MMWmrkUgJgKOlZnGtLWdjhl%2FAC7jdOHUn9zT2XwtB5mCrhptxT%2BKtT%2BiHM%2B9OllOYjeCEgogkN9xsVK9avNWuyb2ZdQ0cXtEVwyH2TyuO%2B9EebpFaZjE36a8lmbk8x3RVhfDb2SRMxrAnNOd1Qwb6jMM1kKqFnalf5DqPKRy080I%2Fo8EvXfz1%2F2MJjkGEU0gl62CqUFqLpqGtASqy4q2XTmEMbu7jN1IlmkGAr7daJGp7EvVsIJj%2F77%2FtiOPDbyQ6Ue%2F6EuDnm%2BZ0yJnUwVpScvg0ccz2GQh%2BFIWCG1hyZ2LobYRvZ6tHgZsg1IBDzpwMJrE9YgGOqYBQT0BJMYZPBm6RpbxantUH88iIzPQBT55L%2FIu0RHPXUNN5LQ37vIhYSE%2FDMAmw%2BAarp%2B2dUibM3vg9lCBZYQxuC%2BA2GKupyMcpZn10IRLbXh0Ua5i1D0ZjjRIFWNc6Yx0wflVTg8SV%2F0dRftCBbrWjZgI2gf03ApY%2FdTag6vcqgQBaXrbgC6peggd4gTZ69Z7l8bUr2rOhQK3hYENi99VgzP89gDQ%2BQ%3D%3D&X-Amz-SignedHeaders=host&response-content-disposition=inline%3Bfilename%3D%22companies_house_document.pdf%22&X-Amz-Signature=5147b86bb4754cee4d10f14f774a5895b3f2685f76df48dde795a5295ab44eb4

(38). Nomination de Zarrouk Youssef Nabhani comme Directeur de Chams Yachting LTD.
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(39). L’entreprise Karoui & Karoui Luxe S.A., au Luxembourg.
http://opengazettes.com/gazette_notices/329637415

(40). Youssef Zarrouk au Panama.
https://en.datocapital.com.pa/executives/Youssef-Zarrouk.html

(41). Page Facebook de Youssef Zarrouk
https://www.facebook.com/profile.php?id=100010298197912

(42). Photo du jour: Le déjeuner au cours duquel le sort du gouvernement a été scellé, Espace Manager (2020).
https://www.espacemanager.com/photo-du-jour-le-dejeuner-au-cours-duquel-le-sort-du-gouvernement-ete-scelle.html

(43). Tunisie : jeux d’alliances et volte-faces, les dessous de l’élection de Rached Ghannouchi à la tête du Parlement, Jeune Afrique (novembre 2019).
https://www.jeuneafrique.com/856604/politique/tunisie-jeux-dalliances-et-volte-faces-les-dessous-de-lelection-de-rached-ghannouchi-a-la-tete-du-parlement/