En ces temps où l’État islamique (EI) multiplie les exécutions et les scènes d’horreur, la question apparaît suspecte, peut-être même insolente. Pourtant, elle devrait sérieusement être étudiée jusqu’au bout car elle risque de révéler des choses intéressantes. En effet, que reproche-t-on exactement à l’EI ? Pourquoi les peuples de tant de pays sont-ils tant en colère contre l’EI ? Pour quelles raisons une coalition regroupant plusieurs forces armées occidentales et des pays du Golf est-elle en train de bombarder les territoires contrôlés par L’EI en Syrie et en Irak ? Examinons les arguments de ceux qui avancent qu’on doit combattre l’EI.
1- L’État islamique est une organisation terroriste.
Au printemps 2011, des protestations contre le régime de Bachar Al Assad ont éclaté en Syrie. Comme tout le monde le sait, le régime syrien a ouvert le feu sur les manifestants et une lutte armée a donc commencé. Assez rapidement, le pays s’est engouffré dans une guerre civile où plusieurs groupes armés luttent pour étendre leur pouvoir sur certaines zones géographiques. Les principaux belligérants sont l’Armée syrienne, l’Armée syrienne libre (juillet 2011), des organisations islamistes armées telles que le Front Al Nusra ou le Front islamique, les kurdes, et puis l’État islamique. Tous ces groupes armés, sans exception, ont conduit des combats armés, tué des gens, pratiqué la torture et des exécutions de masse. Le gouvernement syrien en premier, disposant de toutes sortes d’armes lourdes, de chars d’assaut, de bombes, d’armes chimiques, d’hélicoptères, d’avions de combat, a procédé de toute évidence à la torture systématique et à des exécutions de grande envergure de plusieurs milliers d’opposants syriens. Plusieurs rapports montrent des photos insoutenables de membres coupés, de yeux et organes génitaux arrachés, de chairs mutilées, brûlures, électrochocs… Sans parler des viols, des exécutions par balle, décapitations, ou encore des prisonniers laissés mourir de faim entassés dans leurs cellules.
Si de telles activités peuvent être qualifiées de terroristes, alors oui, toutes les parties participant à cette guerre civile syrienne sont des organisations terroristes. Que veut dire ici “terroriste” ? En temps de guerre, chaque partie a intérêt à tuer et à terroriser l’adversaire, sinon il en va pour sa propre survie. Si l’argument avancé par la coalition internationale pour bombarder l’EI est la lutte contre le terrorisme, alors il faudrait aussi qu’elle bombarde l’Armée syrienne libre et les quartiers généraux du régime syrien. Pourquoi ne le font-ils pas ? Vous voyez comment cet argument qui avance que l’EI est une organisation terroriste n’est pas valable pour justifier l’action militaire internationale dirigée par les États-Unis contre l’EI à lui tout seul. Explorons les autres arguments.
2- L’État islamique utilise des méthodes d’exécution barbares et inhumaines.
L’EI a dégoûté l’opinion internationale en diffusant l’exécution par égorgement (et ensuite décapitation) du journaliste américain James Foley en août 2014. La même scène macabre se renouvelle par la suite avec S. Sotloff (américano-israélien), D. C. Haines (britannique), P. Kassig (américain), et puis H. Yukawa et K. Goto (deux japonais). Le paroxysme de la barbarie a été atteint lors de la diffusion par l’EI de la vidéo du pilote de chasse jordanien Mouath Al-Kassassibah brûlé vif dans une cage. Entre temps, plusieurs centaines d’autres syriens et irakiens ont été exécuté soit par décapitation, par balles, pendaison, crucifixion, chute forcée du toit d’un bâtiment en altitude, etc. et ce par tous les belligérants de la guerre irako-syrienne. Mais étant donné que les exécutions de ces occidentaux et du pilote jordanien ont été beaucoup plus médiatisées, l’opinion a surtout était affectée par le sort réservé à cette petite minorité. Pourtant, il est évident que dans la guerre civile syrienne, l’EI n’a pas le monopole des exécutions barbares. Le régime de Bachar Al-Assad le surpasse sans aucun doute, et cela de père en fils.
Si l’argument de bombarder les positions de l’EI parce qu’il utilise des méthodes d’exécution barbares était valable alors il faudrait aussi encore une fois bombarder les quartiers généraux de l’armée syrienne. Il faudrait aussi s’interroger sur les méthodes d’exécution en Arabie Saoudite, en Chine, aux États-Unis, etc. et mener une étude mesurant le degré de barbarisme des différentes méthodes d’exécution : pendaison, chaise électrique ou injection létale (États-Unis), décapitation en Arabie Saoudite, etc.
Encore une fois, l’argument du barbarisme n’est pas valable. Toutes les exécutions sont barbares et en particulier en temps de guerre. La seule chose qu’on peut reprocher à l’EI est la mise en scène d’une très petite partie de ses exécutions. L’Arabie Saoudite aussi a recours à l’exécution publique par décapitation. Plusieurs dizaines de personnes y sont exécutées de cette façon chaque année. Mais étant donné que l’enregistrement vidéo de ces scènes est strictement interdit dans le royaume, alors cela n’a pas l’air de trop déranger l’opinion internationale.
L’exécution par le feu du pilote de chasse jordanien a été sévèrement et unanimement critiquée par l’opinion internationale, pourtant, ce même pilote faisait partie de la coalition qui bombardait les positions de l’EI en Syrie et en Irak. Le bombardement d’être humains résulte en une mort qui se compare tout à fait à la mort par brûlure. En choisissant l’exécution par le feu pour le pilote jordanien, l’EI a voulu appliquer la vieille Loi du talion (œil pour œil, dent pour dent). Le pilote jordanien de l’avion de combat F-16 brûlait ou faisait exploser les gens par ses bombes. Si par manque de chance, la bombe ne tombe pas directement sur l’être humain en question, il se peut qu’il souffre de ses brûlures pendant plusieurs heures ou plusieurs jours avant de mourir. Comment s’étonner du fait que Mouath Al-Kassassibah ait été brûlé vif ? Sachant très bien que si l’EI voulait le torturer avant de le tuer, il n’aurait pas utilisé d’essence (ou autre liquide inflammable) pour accélérer la combustion, mais l’aurait brûlé en utilisant du bois comme au Moyen-Âge français (dont on est pas loin).
Encore une fois, ce qu’on peut reprocher à l’EI est le fait de mettre en scène la mort d’un homme brûlé vif, tandis que les dizaines ou centaines d’attaques aériennes conduites par les États-Unis et autres pays de la coalition ne nous montrent pas d’images ni de vidéos du sort des gens qui ont été bombardés. Les médias ne montrent que des vidéos en noir et blanc de cibles aériennes prises au milieu d’un viseur d’avion de chasse et détruites dans les secondes qui suivent. Le tout ressemble à une scène de jeu vidéo. Il n’y a pas de souffrance, il n’y a pas de sang. La barbarie est pourtant la même. Mais les deux styles de montages vidéo laissent bien évidemment l’opinion très hostile à l’EI et appuyant de plus en plus la guerre menée en Syrie et en Irak par la coalition dirigée par les États-Unis. Étant donné que le sentiment de l’horreur est ici mis de l’avant, l’opinion peut facilement être manipulée pour appuyer une guerre sans nécessairement recourir à des arguments raisonnables.
3- L’État islamique n’est pas un pays reconnu. C’est une organisation hors-la-loi.
Quel état est-il reconnu en Syrie ? Le régime syrien de Bachar Al-Assad est appuyé par le Hezbollah (chiite), la Russie, l’Iran, l’Irak, la Corée du Nord, etc. L’opposition (si on peut vraiment parler d’une opposition), en particulier l’Armée syrienne libre est supportée par les États-Unis, la France, la Turquie, le Qatar, l’Arabie Saoudite, etc. Les kurdes sont supportés à peu près par les mêmes forces extérieures à part la Turquie qui ne veut pas voir les Kurdes devenir trop puissants à ses frontières ; et n’a pas hésité pour cela de fermer l’œil sur le mouvements de djihadistes internationaux rejoignant les rangs de l’EI. Le support mentionné ci-dessus n’est pas seulement politique, mais il est surtout logistique et militaire. Reste donc à savoir qui supporte l’EI qui est devenu une des forces les plus importantes de la région du nord-est de la Syrie et du nord de l’Irak malgré la présence de plusieurs armées extrêmement bien équipées comme notamment celle de Bachar Al-Assad et celle de la coalition menée par les États-Unis. Quoi que l’on dise, l’EI est devenue une force concurrente à l’armée syrienne et à l’armée syrienne libre dans le cadre de cette guerre de pouvoir. En effet, l’EI n’est pas un pays reconnu, mais il n’y a pas d’unanimité sur la reconnaissance d’une entité ayant la légitimité de contrôle sur cette zone géographique du monde.
Il faut tout de même rappeler que ce qui a vraiment motivé les américains à attaquer l’EI est l’invasion de ce dernier des territoires riches en pétrole du nord de l’Irak ; de toute façon les États-Unis ont avec l’Irak plusieurs accords de défense, et en juin 2014 l’Irak a été manifestement très dangereusement attaqué par l’EI qui s’est approprié Mousoul, Tikrit et jusqu’à Samarra à 200 km de Bagdad. Au même mois, en juin 2014, Obama a ordonné l’envoi de forces préparant une attaque de l’EI en Irak. Le 5-7 août 2014, les États-Unis ont commencé à armer les Kurdes du nord de l’Irak (Peshmargas) et à bombarder des positions de l’EI. Le 19 août 2014, l’EI met en ligne la première vidéo de son genre, commençant par “A Message to America” et finissant par la décapitation de James Foley. Du point de vue de l’EI, toute la série d’exécutions, qui ont soigneusement été mises en scène et médiatisées, ne sont que la réponse logique d’une légitime défense contre un agresseur étranger dans un contexte de guerre civile locale. C’est la même chose pour les attentas que l’EI appelle ses sympathisants à commettre directement dans les pays de la coalition.
Donc pour résumer, il est vrai que l’EI n’est pas un pays reconnu, mais la Syrie est en ce moment dans une guerre civile où plusieurs aspirants s’entre-tuent pour former un pays. Il n’y a donc pas de raison de bombarder l’EI en particulier de ce point de vue là. Mais il est vrai aussi que l’EI est sorti des frontières de la Syrie pour s’attaquer à un pays qui a un gouvernement internationalement reconnu : l’Irak. Il faut donc en effet condamner l’EI ici, de la même façon qu’il faut condamner les États-Unis quand George W. Bush a envahi l’Irak en 2003 sous prétexte qu’il voulait libérer le monde et le peuple irakien de la menace d’armes de destruction massive qui étaient supposées être détenues par Saddam Hussein. Vous imaginez combien d’irakiens le gouvernement des États-Unis a tués en 2003 pour absolument rien ?! Donc pour ce qui est de l’action hors-la-loi, nous voyons bien ici comment les États-Unis et l’EI ont exactement la même face. Et si on voulait vraiment sanctionner ceux qui agissent en dehors leurs frontières d’une manière reconnue par l’ONU comme illégitime ou illégale, alors pourquoi, tout en frappant l’EI, ne frapperait-on pas les États-Unis ou Israël ? Cet argument, dur à combattre, se retrouve bien évidemment au cœur de la propagande de l’EI qui profite de la véritable injustice internationale.
4- L’État islamique ne représente en aucun cas l’islam, ni les musulmans.
Cet argument, avancé par plusieurs musulmans, organisations musulmanes et même par Obama et d’autres dirigeants occidentaux, n’a absolument aucune valeur, à part pour le fait qu’il soit extrêmement médiatisé. Plusieurs musulmans soutiennent l’EI. Des milliers ont pris l’avion pour aller se battre à ses côtés. Sur YouTube, Twitter et Facebook des centaines de milliers de personnes applaudissent tous les jours les vidéos de l’EI, ses actions, les exécutions d’occidentaux, les attentats en France, au Canada, etc. Plusieurs commentent les contenus, soutiennent la justice que l’EI est en train d’établir. Plusieurs partagent les vidéos, les envoient à leurs amis, ils en parlent dans leurs quartiers et dans les mosquées. Concrètement, plusieurs musulmans dans le monde entier soutiennent plus ou moins discrètement l’EI. Plusieurs le soutiennent d’un point de vue idéologique, logistique, financier, et même militaire. Ces gens habitent souvent dans les pays dont les gouvernements ont envoyés leurs avions militaires sur l’Irak et la Syrie : des citoyens des États-Unis, de l’Europe, de l’Afrique, de la Tunisie, du Maroc, de l’Égypte bien sûr, de l’Arabie Saoudite et de tous les autres pays du golf. Plusieurs musulmans sunnites irakiens soutiennent activement l’EI et le laissent se camoufler dans leurs villes. Plusieurs musulmans en Irak et en Syrie, mais aussi dans le monde entier, pensant sérieusement qu’un pays constitué par l’EI serait mille fois meilleur et plus juste que le régime barbare de Bachar al Assad ou du régime américano-irakien de Nouri Al-Maliki. Plusieurs musulmans dans les pays ultra-orhtodoxes du Golfe soutiennent l’EI et des riches le financent. Plusieurs musulmans tunisiens soutiennent les attaques perpétrées contre les militaires dans leur pays, ou contre Charli-Hebdo en France et bien évidemment la politique menée par l’EI.
Il ne faut donc pas se leurrer et dire que les musulmans ne supportent pas l’EI. Même de dire que la très grande majorité des musulmans se réclame complètement contre l’EI ne peut être appuyé par aucune donnée statistique. La réalité étant que dans les médias on ne peut voir que ceux qui condamnent le terrorisme de l’EI. Ceux qui l’approuvent et l’appuient, n’ont pas le droit d’exprimer cette opinion même dans les pays occidentaux supposés garantir la liberté d’expression. Afficher son soutien à l’EI dans ces pays équivaut à soutenir une organisation terroriste et peut être très sévèrement puni par la justice (apologie de terrorisme). Ce grand déséquilibre médiatique contribue donc à fausser l’opinion publique et à faire croire réellement aux gens que l’EI n’est pas islamique. On le voit dans les mots soigneusement choisis par Hollande ou Obama qui évitent d’utiliser les mots “état islamique” ou “islamic state” préférant dire “Daech”, “ISIS” ou des acronymes de la sorte qui veulent dire exactement la même chose que “état islamique”.
L’État islamique représente donc une partie non-négligeable de l’islam et des musulmans. Il n’y a aucun doute là-dessus. D’ailleurs, d’un point de vue théologique, plusieurs autorités religieuses et imams soutiennent publiquement l’EI. Plusieurs autres le soutiennent implicitement ou discrètement, ou mènent un double discours public-privé. Les dirigeants de l’EI eux-mêmes se proclament de l’islam et sont considérés par plusieurs musulmans comme une autorité en la matière. Leurs actes et leurs discours sont toujours motivés par les textes islamiques du coran et du hadith (paroles du prophète). Vous allez dire que c’est une lecture fausse de l’islam, mais il y a eu depuis la mort du prophète Mahomet plusieurs lectures divergentes des textes, et sur lesquels les musulmans ne sont pas d’accord. L’argument que l’EI ne représente en rien l’islam et les musulmans n’a donc aucune validité.
5- On ne peut pas laisser l’État islamique former un pays et tuer les gens.
Comme on l’a déjà vu, l’organisation qui va finir par remporter la guerre et former un pays devra de toute façon user d’une violence sans bornes, terroriser la population et tuer des milliers de gens. Les pays de la coalition dirigée par les États-Unis ont déjà commencé eux-mêmes à prendre part au massacre. Plusieurs autres pays de l’ouest comme de l’est sont en train d’armer lourdement les différents belligérants ce qui prouve que chaque partie sera invitée à exterminer l’autre. Le fait de ne pas vouloir laisser l’EI tuer les gens est donc un argument complètement faux et très hypocrite car ceux-là qui le disent sont eux-mêmes en avant de la scène de ce massacre.
Pourquoi donc ne pas arrêter cette guerre et laisser l’EI étendre son califat et en finir ainsi avec les vidéos macabres d’exécutions d’otages ? En théorie, il n’y a aucune raison de penser que l’EI serait plus cruel que celui de Bachar Al-Assad ou celui de l’Arabie Saoudite qu’on tolère très bien d’ailleurs. D’un point de vue du respect des droits de l’homme, il est même certain que sous le règne de l’EI les femmes auraient plus de droits qu’en Arabie Saoudite, car l’EI a une idéologie salafiste qui renvoit à la vie du prophète lui-même. Et dans le temps du prophète, les femmes avaient bien plus de droits que les femmes d’Arabie Saoudite aujourd’hui. Ensuite, comme avec l’Arabie Saoudite dont le système judiciaire décapite des gens en public, leur coupe la main, prive la femme de ses droits de voter, voyager, conduire, les pays occidentaux pourraient entretenir des relations de commerce avec l’EI, acheter du pétrole contre des produits industriels y compris de l’armement. On voit bien donc que cet argument moral qui a réussi à convaincre l’opinion publique de se mettre aux côtés de leurs gouvernements pour cette guerre contre l’EI n’est pas du tout valable ; et il s’agit plutôt d’une grave manipulation de l’opinion publique.
Qu’a-t-on donc réellement à reprocher à l’État islamique ?
On a vu comment tous les arguments moraux de défense des droits de l’homme ou le fait d’agir contre la barbarie et pour la liberté, etc., tous ces arguments qu’on nous a déjà servis pour justifier plusieurs guerres sont complètement infondés. Car il est évident que, du point de vue des libertés et des valeurs démocratiques occidentales, l’EI n’est pas en soi un mal pire que celui de Bachar Al-Assad ou celui du régime saoudien. Les vidéos d’exécutions macabres soigneusement montés ne font que jouer sur l’émotion collective des gens et éloignent l’opinion publique des véritables enjeux que les dirigeants occidentaux et pro-occidentaux (pays du golfe notamment) ne veulent pas aborder.
Si l’État islamique n’est pas attaqué par les forces occidentales et des pays du golf, alors cette nouvelle puissance risque de déclencher une guerre mondiale très importante. L’EI joue le rôle d’un déstabilisateur très intéressant d’une région stratégique et très riche en pétrole. Certaines puissances (multinationales, politiciens, hommes d’affaires fortunés, entreprises d’armements) pourraient donc en profiter pour étendre leur influence dans la région aux dépends des américains et autres pays occidentaux. Ces gens peuvent êtres des russes, des saoudiens, des qataris, des turcs, des iraniens. La main mise des États-Unis (politique et militaire) sur ces régions riches en pétrole dérangent plusieurs puissances notamment la Russie, l’Iran, la Chine et bien évidemment les islamistes du monde entier. L’EI est donc le déclencheur parfait pour justifier une intrusion militaire dans une véritable mine d’or. Ceux donc qui font la guerre à l’EI ne le font que pour étendre leur influence dans la région et ne sont pas nécessairement plus ou moins terroristes que les terroristes eux-mêmes. Et s’ils n’étendent pas leur influence, plusieurs se battent pour protéger leurs intérêts telles que la Russie, l’Arabie Saoudite, l’Iran. Ces pays là sont aussi terroristes que l’EI lui-même. Enfin, au cœur de la région il y a toujours la question de la sécurité d’Israël que l’on défend malgré le massacre qu’il a perpétré à Gaza et malgré le caractère illégal des colonies juives. Celui qui prendra le contrôle de la région, pourra devenir assez riche et puissant pour représenter un sérieux risque aux israéliens. Selon nos intérêts donc, on va soutenir l’une ou l’autre des organisations (toutes aussi barbares et terroristes les unes que les autres) qui se battent sur le terrain. Il est donc évident que pour les États-Unis et leurs alliés, le contrôle de l’EI sur la région n’est pas souhaitable, car il ne voudra pas collaborer avec eux comme l’Arabie Saoudite et l’Irak actuel le font par exemple. Mais que l’Arabie Saoudite coupe des têtes et déshumanise les femmes, que Israël colonise la Palestine, que les États-Unis et autres pays se donnent le droit d’aller bombarder des gens ici et là, cela on ne l’appelle pas du terrorisme et on ne le condamne pas. Cette injustice très manifeste fait la force des arguments de l’État islamique qui réussit à séduire de plus en plus de jeunes. Il n’y a donc rien du tout qu’on puisse reprocher à l’EI qu’on ne peut pas se reprocher à nous-mêmes et à nos gouvernements. Il est totalement faux de penser que l’EI est plus barbare ou plus terroriste que les gouvernements des pays occidentaux, de la Russie, de la Chine, de la Syrie ou de l’Iran par exemple. C’est d’ailleurs le barbarisme et le terrorisme des pays occidentaux qui explique aujourd’hui la naissance de ce monstre qu’est l’EI. C’est le barbarisme et le terrorisme des pays occidentaux qui explique que de plus en plus de jeunes seront tentés par les actions terroristes à l’intérieur même de ces pays. Le monde qui se dit libre contribue par son hypocrisie et son injustice au succès international de l’EI. La manipulation de l’opinion publique va continuer à nous mener vers un futur redoutable et très incertain.
Cet article s’est voulu être une modeste tentative pour éclairer l’opinion et l’aider à réfléchir au-delà de la simple réaction émotive, car nous sommes tous, en tant qu’êtres humains, face à un péril qui me semble assez grave et lourd de conséquences, et nous commençons déjà à en payer le prix.